Les bébés de la consigne automatique, Ryu MURAKAMI

Publié le par pacocado

undefined

Déconseillé aux âmes sensibles


Voilà un livre qui m' a donné du fil à retordre ce qui explique mon absence  de presqu'un mois sur ce blog, non seulement parce que c'est un pavé  (520 pages en petits caractères) mais aussi parce que c'est un roman pas comme les autres, étouffant,  éprouvant, dérangeant, et qu'il m'a fallu un peu de temps pour trouver les mots mais aussi l'envie d'en parler.

Les bébés de la consigne automatique  suit le destin de deux  survivants. Haski et Kiki, tout deux abandonnés dans une consigne de gare par leurs mères respectives et tout deux recueillis par le même orphelinat puis  adoptés par un même couple. Devenus grands, ils vont tous les deux suivre leur voie à la recherche de leur identité. Hashi va se prostituer avant de devenir une idole tandis que Kiku, un temps champion de saut à la perche va finir en prison pour parricide.

Ce livre est d’une noirceur absolue, sans une once d’optimisme ni d'espoir:  Les deux héros, qui évoluent dans un ToKyo décadent, où violence, drogue, sexe, et folie  sont le lot quotidien,  ne parviennent pas à se libérer de ce traumatisme originel et tentent d’y  trouver un exutoire par la haine envers eux-mêmes et  envers les autres. Une multitide de personnages gravite autour d'eux dont aucun n'est à vrai dire plus sain que nos deux héros, mais sont tout aussi intéressants et touchants, d'Anémone et son gavial à Mister D en passant pas les compagnons de cellules de Kiku.
Murakami excelle d'ailleurs dans l'art de décrire ces personnages de deuxième ou de troisième rang par un paragraphe racontant leur histoire, leur passé, improbable mais réaliste à la fois, autant de perles qui jalonnent le récit.


Le malaise est sans doute  amplifié par l'écriture très poétique, presque lyrique de Murakami.

Un livre choc donc qui éclaire la société japonaise sous un jour nouveau.
On peut même parler de chef d'oeuvre tant il finit par atteindre une partie de notre âme que les livres atteignent pourtant très rarement.


Une adaptation cinématographique  est prévue pour 2008.



Premières Phrases:

La femme appuya sur le ventre du bébé et prit le petit sexe dans sa bouche. Il était plus fin que les cigarettes américaines mentholées qu'elle fumait d'ordinaire, et avait un goût de poisson cru. Elle leva la tête pour voir si le bébé pleurait  et s'aperçut qu'il ne bougeait plus, bras set jambes complètement immobiles .Alors, elle enleva le film de plastique qui recouvrait le visage de l'enfant, mis deux serviettes au fond d'une boîte de carton, posa le bébé dedans, entoura le tout de scotch puis de ficelle.

Morceaux choisis:

« Rien n’a changé depuis l’époque où on hurlait enfermés dans nos casiers de consigne, maintenant c’est une consigne de luxe, avec piscine, plantes vertes, animaux de compagnie, beautés nues, musique, et même musées, cinémas et hôpitaux psychiatriques, mais c’est toujours une boite même si elle est énorme, et on finit toujours par se heurter à un mur, même en écartant les obstacles et en suivant ses propres désirs, et si on essaie de grimper ce mur pour sauter de l’autre côté, il y a des types en train de ricaner tout en haut qui nous renvoient en bas à coups de pied. »


Publié dans Misère noire

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article