1275 âmes, Jim Thompson

Publié le par pacocado

Nick Corey est le shérif d'une petite bourgade du sud des Etats-Unis que tout le monde, y compris sa femme, prend pour un crétin doublé d' un lâche et d'un fainéant., plus occupé à garder son logement de service qu'à protéger ses honorables électeurs. Les apparences sont peut-être parfois bien trompeuses...

Je n'en dirais pas plus pour ne pas emousser l'énorme surpise qui s'empare de vous à la lecture de ce roman...Pour moi, un vrai coup de coeur..
Le roman est centrée sur Nick, le narrateur qui nous livre avec son langage familier mais terriblement nature et vrai,  sa conception du métier de shérif, les moyens plus que subversifs qu'il utilise  pour régler ses problèmes et sa conception de l'humanité. Il nous dresse à travers son récit cinglant un portrait au vitriol d'une Amérique profonde des années 20, raciste, hypocrite , et ancrée dans ses convictions religieuses etriquées. On s'attache bien malgré nous et c'est là tout le génie de Thompson,  à cet anti-héros dont on ne sait plus quoi vraiment penser d'ailleurs, personnage enigmatique et équivoque,  à l'instar de sa phrase fétiche : "je dis pas que vous avez tort, mais je dis pas que vous avez raison non plus",  tout à la fois Machiavel et Candide.
Un livre pessimiste, cynique et à l'humour noir grinçant, voilà ma recette préférée...et je me suis régalée....

Bertrand Tavernier a adpaté ce livre en 1981 avec Coup de Torchon.

Premières Phrases:

"Eh ben, mes enfants, je devrais l'avoir belle. Etre peinard, ce qui s'appelle. tel que vous me voyez, je suis le shérif en chef du canton de Potts, et je me fais pas loin de deux milles dollars par an - sans compter les petits à-côtés."


Morceaux choisis:

« Des fois, je me dis que c'est peut-être pour ça qu'on ne progresse pas aussi vite chez nous que dans d'autres régions. Les gens perdent tellement de temps à en lyncher d'autres, ils dépensent tellement d'argent en corde et en essance, à se cuiter par avance et autres choses essntielles, qu'il ne reste plus guère d'argenet ni de main d'oeuvre disponible pour les travaux courants»
(p.118)


"Les pauvres petites filles sans défense qui pleurent en voyant leur père entrer dans leur lit. Les hommes qui battent leurs femmes et les femmes qui hurlent des supplications. Les gosses qui pissent au lit, d'angoisse et de peur, et leurs mères qui les punissent en les aspergeant de poivre rouge. Les visages hâves, hagards, ravagés par le ténia et le scorbut. La sous-alimentation, les dettes toujours plus fortes que le crédit. La hantise, comment on va manger, où on va dormir, comment on va couvrir nos pauvres culs tout nus. Le genre d'obsession qui fait que, quand on n'a rien d'autre dans la tête, mieux vaut être mort. Parce que c'est le vide des idées, quand on est déjà mort en dedans, et qu'on ne fait plus que répandre la saloperie, la terreur, les larmes, les cris, la torture, la faim et la honte de sa propre mort. De son propre vide."
(p236)



Publié dans Misère noire

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